Activité expérimentale en matière molle
Vous trouverez ici, dans un ordre chronologique inverse, une sélection de mes contributions expérimentales en matière molle. Celles qui m’ont occupé le plus et m’ont particulièrement intéressé.
Les membranes (naturelles ou artificielles) sont omniprésentes. Elles assurent la compartimentation, chez les organismes vivants à toutes les échelles (noyau, mitochondrie, cellule, organe, organisme), mais aussi dans tous les dispositifs électrochimiques artificiels (piles, batteries). Fondamentalement, le rôle de cette compartimentation est de ralentir les réactions chimiques entre constituants de chaque compartiment. Mais ces réactions chimiques sont néanmoins nécessaires pour le fonctionnement du dispositif. La membrane joue donc un rôle double et contradictoire : elle doit séparer, mais pas trop.
L’interaction des membranes cellulaires avec les molécules adsorbées à leur surface et la façon dont l’incorporation de ces molécules s’opère sont encore assez mal comprises. Nous nous sommes intéressés aux peptides antimicrobiens qui constituent la clé de voute du système immunitaire inné des organismes pluricellulaires. Essentiellement, ces peptides rendent les membranes perméables en y formant des pores. Leur présence universelle dans les règnes animal et végétal, leur action non-spécifique et à large spectre ainsi que leur structure très élémentaire laissent entrevoir un mode d’action selon des mécanismes physiques eux aussi très généraux et universels.
La matrice extra cellulaire est un gel. C’est à dire un réseau solide de macromolécules reliées entre-elles, ici principalement des protéines comme le collagène. Cette matrice entoure et délimite les organes. Les processus d’invasion cellulaire et de vascularisation des tumeurs impliquent son franchissement par les cellules qui pour cela produisent des enzymes protéolytiques (les protéinases) qui brisent les liens de ce réseau. Comprendre leur fonctionnement est donc important pour lutter contre la dissémination des cellules cancéreuses.
Les polymères associatifs s’assemblent en structures supramoléculaires dont la formation et l’agencement résultent de l’équilibre délicat entre des forces contradictoires. Parmi celles-ci, les forces entropiques liées à la perte de degrés de liberté des molécules, par exemple liberté de translation ou liberté de conformation etc. Ils illustrent parfaitement les différents problèmes rencontés dans l’étude de la matière molle. Principalement étudiés à partir des années 1980 en l’absence de solvant, mes contributions dans le domaine portent sur les structures obtenues en solution.
Une théorie est une économie de pensée (lire E. Mach , P. Duhem , A. Einstein ). On se représente le réel en établissant des liens improbables entres des choses ou des phénomènes a priori très différents. Dans les années 1970, P.G. de Gennes réalise une avancée majeure de ce type en remarquant que les polymères étaient des objets critiques dont les propriétés d’autosimilarité permettent d’établir des lois de comportement universelles (appelées lois d’échelle) pour des grandeurs macroscopiques observables comme la pression osmotique, la viscosité ou l’élasticité lorsqu’elles sont exprimées en fonction de variables soigneusement choisies (appelées variables réduites).